Anthony Sitruk

« Je pense sérieusement que je n’aurais jamais écrit si je n’avais pas lu Djian. Et je suis sûr que nous sommes nombreux dans ce cas ! Le précepte que j’ai suivi lors de l’écriture, c’est de fonctionner phrase par phrase, sans plan, en essayant systématiquement de sortir des rails et de faire ce pas de côté dont parle Djian (NDLR : Anthony fait référence à l’émission télévisée « Extrait – La Grande Librairie – «Marlène», nouveau roman de Philippe Djian », dont le texte abordant le thème de la normalité est retranscrit sur ce site, dans la rubrique EXTRAITS). Avec l’idée que « chaque phrase doit porter la vie ». On va dire que j’ai suivi ses conseils. »

 

Chronique de Anthony Sitruk

[Sur l’écriture : d’où viennent les idées ?]

Durant l’écriture d’un livre, d’où vient l’inspiration ?

Difficile de répondre à cette question, tant il est commun de se laisser porter par une certaine logique développée pour (et par) les personnages. Ce qui est d’autant plus flagrant dans mon 3ème roman (BIEN SÛR, NOUS EÛMES DES ORAGES – publication mi-2023 chez Pop Cards Factory), où chaque idée, chaque phrase, s’est mise en place d’elle-même, en toute autonomie, presque par surprise (fameux concept de se faire surprendre par ses propres personnages).

Mais la première idée, la toute première… elle vient d’où ?

Pour ce dernier roman, je m’en souviens très précisément, c’était le 28 mai 2016, au Mk2 Nation, à la projection du film « Elle » (de Paul Verhoeven, avec Isabelle Huppert). Au milieu du film, j’ignore pourquoi, j’ai le pressentiment que le corps sans vie du personnage de Virginie Efira se trouve au sous-sol de la maison…

Bon… Tout faux (alors que j’avais pourtant lu le livre « Oh… » à l’origine du film) ! Virginie Efira réapparait bien à l’écran, et en vie (désolé pour le spoiler).
Mais l’idée, elle, reste, intraitable, persistante, insidieuse : celle d’un homme qui conserve le cadavre de sa femme dans le sous-sol de la maison. 2 heures plus tard, je suis chez moi, devant l’ordinateur, et je tape le tout premier mot du livre :

« Beurk !… »

Puis le deuxième.
Le troisième.
Et ainsi de suite, sur 200 pages, pendant 4 ans.

Chez moi, l’idée initiale est donc essentiellement visuelle, voire cinématographique (je reviendrai sur la distinction dans le prochain post). C’était déjà le cas pour « Pornstar » (La Musardine, 2013 – le canevas de « Rocky » appliqué au cas d’un ancien acteur X basculé dans le milieu cinéma traditionnel), et pour « La Vie brève de Jan Palach » (Le Dilettante, 2018 – inspiré d’un documentaire vu sur Arte en décembre 1995).

[Cinématographique, le livre l’est aussi parce que le personnage se rapproche de celui du fameux « Blue Holocaust » de Joe D’Amato, qui conservait lui aussi le cadavre de sa femme.
Il l’est d’autant plus que de nombreuses petites références viennent ponctuer certaines scènes, certains dialogues – références qu’il faudra vous amuser à retrouver.

Bref, vous aimez le cinéma ? Vous aimerez ce roman où se croisent Ferreri, Tarantino, De Palma, Godard, Zoe Lund, Argento, Hartley, Carax…]

Et vous, vos idées, votre inspiration viennent d’où ?
Du quotidien ? D’un rêve ? De votre entourage ?

[Photo : collection Florian Vigneron]

 

 

 

Né en 1975, Anthony Sitruk grandit à Sarcelles. Passionné de cinéma, il veut devenir créateur de maquillages et d’effets spéciaux. Puis scénariste. Puis parolier. Puis médecin légiste. Pour finalement atterrir dans un grand groupe aéronautique, en tant que chef de projet informatique.
En 2013, son premier roman, Pornstar, plongeait dans le milieu sordide du X parisien à travers le destin d’un acteur sur le retour. Dans La Vie brève de Jan Palach, il nous conduisait
à Prague, sur les traces de cet étudiant tchécoslovaque qui s’immola par le feu le 16 janvier 1969, place Venceslas.
Bien sûr, nous eûmes des orages, édité par Popcards Factory Editions, est son troisième
roman.

  • Bien sûr, nous eûmes des orages (Genre : Roman > Collection Jaune Cruel – Popcards Factory Éditions / avril 2023)

 

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